Les installations en cours de Véronique Matteudi : rêve & poétique du vide

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Véronique Matteudi, une des invités de cette édition spéciale, a commencé son travail d’installation dans les hangars du parc Ar Milin’ (Châteaubourg, 35) où elle a tissé des lianes de clématite sauvage.

Véronique Matteudi se consacre essentiellement à la sculpture, depuis une vingtaine d’années, et participe à de nombreux évènements liés à l’art et l’environnement. Diplômée de l’école des Beaux Arts de Grenoble et de la Villa Arson à Nice, elle trouve son inspiration dans l’univers de la forêt. Elle crée essentiellement avec le végétal (lianes de clématite sauvage), le minéral ou la terre. Ses oeuvres cherchent à tisser des liens entre les multiples formes du vivant. C’est par une immersion dans la réalité du paysage que la création devient pour elle vecteur de lien et de dialogue entre l’homme et la nature.

Lianes de clématite sauvage : la marche et la matière

Véronique a grandi dans la montagne du Vercors et a toujours beaucoup marché. « L’univers des bois, des arbres me parle. Je marche tous les jours, des fois, dans une sorte de déambulation, une rêverie et le paysage est là, propice à l’inspiration. Je peux entrevoir une image, une oeuvre, une installation, que je dessine ensuite au crayon.  »

Depuis une vingtaine d’années, Véronique récolte des lianes de clématite sauvage, matière première vivace qu’elle repère au cours de ses marches. L’artiste transcende un matériau parasitaire, envahissant, en dégageant les arbres et en leur ramenant de la lumière. « J’ai beaucoup d’endroits privilégiés pour mes récoltes. Je repère des lieux, des fois difficilement accessibles qui cohabitent avec les orties et les ronces. Je vois si les lianes sont vertes, sèches, anciennes… J’ai l’oeil aiguisé ! »

Véronique Matteudi travaille également avec toute sorte de fils, des métaux, des fibres végétales.  » Ce qui m’intéresse dans le volume, c’est le graphisme et l’organique, la structure de la matière, rendre visible des couches du dessous. Pour l’installation Rêve dans le parc Ar Milin’, j’ai imaginé une structure neuronale à l’intérieur d’une tête ou je mélange clématite sauvage et fils de cuivre, créant une connectique entre le végétal et le métal. »

Véronique Matteudi et Hubert Célérier travaillent ensemble. Elle élabore les projets, collecte les végétaux et réalise le tissage. Hubert est directeur technique. Il réalise les structures porteuses en métal, rond d’acier, puis les peint. Le tissage vient recouvrir l’ossature en métal, la faisant disparaître visuellement. C’est un binôme, des compétences qui se complètent !

La résidence de 4 mois

Véronique et Hubert sont arrivés à Châteaubourg début janvier pour une résidence de 4 mois afin de réaliser in situ deux installations monumentales, à l’occasion des 20 ans de Jardin des arts. Rêve prendra place côté parc d’Ar Milin’ et Poétique du vide côté ville.

 » J’avais apporté une grande quantité de lianes de clématite sauvage de chez moi à Aguts (Tarn, Pays de Cocagne) et j’ai poursuivi mes récoltes ici autour de Châteaubourg  » explique Véronique. « Être en résidence sur une période de 4 mois, permet de s’imprégner des lieux, de rencontrer des artistes, des personnes qui travaillent pour la ville, les services techniques, les jardiniers, des mécènes, des commerçants, les organisateurs, des scolaires, de créer des liens. Le challenge étant de réussir à réaliser les oeuvres dans le temps imparti, qu’elles correspondent au projet initial et enfin qu’elles s’intègrent dans le paysage  » poursuit Véronique.

A propos des deux installations

Les volumes de ces installations dialoguent avec le vide et l’espace environnant. Les volumes créés sont graphiques, vides à l’intérieur. La sculpture révèle ce passage subtil entre le monde intérieur et le monde extérieur.

Ce sont en quelque sorte des trames membranes qui cernent le vide, le révèlent. Notre regard passe au travers de la forme, il n’est pas arrêté à la surface. L’artiste s’intéresse à ce va et vient, à la résonnance qui émane de ce vide.

Poétique du vide

Je me suis inspirée pour ces sculptures de certaines structures observées dans le monde végétal ou animal, où nous nous retrouvons face à une dynamique d’éclosion ou d’implosion, d’émergence ou de rétractation. Depuis l’antiquité dans notre histoire occidentale jusqu’à nos jours, le vide soulève de nombreuses questions métaphysiques pour la science et l’humain. Le « vide » et le « néant » sont différents, car « penser le vide, c’est le penser dans un certain volume alors que le néant peut être défini sans faire référence à l’espace« . Bergson disait que le néant n’est pas pensable, car rien qu’en le pensant, on le détruit.

Dans Poétique du vide, installé dans le parc Bel Air de la Ville, on peut entrer à l’intérieur des deux premières membranes, circuler dans ce vide structuré. Le dernier volume reste impénétrable et garde ainsi sa part de mystère.

Rêve

Apparu pendant le confinement, ce Rêve d’humanité, de changement sociétal et de paradigme (cette vision d’un monde autre)… est comme une connexion neuronale au beau et à la nature. Une aptitude à le respecter et à le voir. « J’avais à la fois envie de douceur et de tisser toutes ces émotions » se souvient Véronique.

Rêve est un rêve où l’homme peut faire pousser des fleurs par la pensée, faire pousser symboliquement du beau, engendrer du vivant. « Il médite, il pense, rêve dans le sens d’une aube d’humanité » extrait des dormeurs éveillés de Gaston Bachelard. Dans cette tête d’homme, l’activité cérébrale est rendue plastiquement visible par un réseau neuronal tissé. Le rêve s’affranchit de l’espace et du temps ordinaire, il offre de l’espoir avec d’autres possibles et peut être un puissant moteur de création…

« J’ai tout d’abord réalisé une maquette, pour comprendre la forme spatiale puis Hubert a réalisé la structure avec des tiges de ronds d’acier. Il fait très attention à rester fidèle. C’est très grand. Ça doit être solide et esthétique. Il faut cocher toutes les cases. »

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